Recherches statistiques sur Mulhouse - Chap. 08 Misère
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- Bibliothèque municipale de Mulhouse
informations détaillées
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- Recherches statistiques sur Mulhouse - Chap. 08 Misère
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Auteur : Achille Penot (1801-1886) est catholique, né à Nîmes, et docteur ès science (1829). Il arrive à Mülhausen en 1822 et chargé des cours de chimie au collège de Mulhouse qu’il dirige pendant plus de trente ans. Membre de la SIM dès sa création, il anime les comités de chimie et d’utilité publique et devient en quelque sorte le porte-parole de la SIM. Achille Penot devient vice-président de la SIM en 1852. En 1871, il quitte Mulhouse pour s’établir à Lyon où il fonde l’école de commerce sur le modèle de celle de Mulhouse. Il publie dans les Bulletins environ 120 études et communications, en particulier sur les questions sociales. Ses travaux statistiques, tout comme son engagement très fort dans le cadre philanthropique d’une ville en pleine métamorphose économique et sociale en font un témoin rare et précieux de la Révolution industrielle.
Commentaire : La misère, la pauvreté, le paupérisme et l’indigence sont des termes très proches au XIXe siècle. Les nuances sont néanmoins fondamentales. Achille Penot, dans l’approche de justification du phénomène industriel qui est la sienne, évite, dans la mesure du possible d’utiliser la notion de paupérisme dans ce chapitre. Celle-ci, dans le vocabulaire de l’époque est en effet directement corrélée avec le phénomène industriel. La misère, quant à elle, renvoie aux siècles précédents et donc aux disettes et famines de la société agricole auxquelles son propos introductif renvoie. L’indigence est une notion sociale qui appelle soit le secours collectif organisé (le bureau de bienfaisance) soit la charité individuelle, cultuelle ou associative. Le chapitre est intéressant à plus d’un titre. Le Dr Penot indique de manière précise les salaires quotidiens des ouvriers dans les différents emplois offerts par l’industrie mulhousienne. Il précise également quelles sont les charges à couvrir, la composition d’une journée type d’alimentation d’un ouvrier et son coût, l’estimation des frais d’habillement et de logement. Ce dernier point est déterminant. Outre l’importance de ce poste, il est très difficile d’accéder à ce type d’information.
Néanmoins, le logement semble sous-évalué et l’auteur ne cite pas dans ses évaluations le coût, très important, du chauffage et accessoirement de l’éclairage. Or, en estimant à 7 F par mois les frais de logement d’un célibataire et à 12 F ceux d’une famille de 5 personnes (p. 157 et 158), Achille Penot semble être très optimiste. Le Dr Villermé nous apprend qu’André Koechlin offre à l’élite de ses ouvriers des appartements de deux pièces en location à 12 et 13 F par mois, soit moins de la moitié des prix courants en ville. Si l’on retient cette base, le logement décent d’une famille ouvrière devrait plutôt se situer aux alentours de 25 F par mois. Les frais de chauffage ne sont toujours pas compris dans cette estimation. Si les chiffres mentionnés par Achille Penot peuvent être considérés comme très optimistes (il les qualifie lui même de minimas), l’auteur n’en demeure pas moins lucide. La Révolution industrielle est une période frappée par des crises très dures. Il qualifie d’ailleurs ainsi l’année 1842 au cours de laquelle il écrit ce chapitre. Les accidents de la vie, infirmités, maladies, veuvage, sont à l’origine de chutes de revenus rapides, génératrices de gêne, voire de misère. L’auteur déplore à ce titre le manque de prévoyance des ouvriers et la nécessité pour le patronat de promouvoir celle-ci, quitte à employer des moyens contraignants.
La description de la mise en œuvre de la solidarité collective municipale (bureau de bienfaisance) ou de la charité privée est également intéressante. Achille Penot est très directif dans ses propositions et préconise une « centralisation » des moyens d’assistance, afin de mieux orienter l’aide, mais également de contrôler efficacement les besoins et d’éviter les abus, et donc la paresse. Le point de vue moral de l’auteur, qui est une des constances de son propos, est ici aussi très prégnant.
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- 1843
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- Recherches statistiques sur Mulhouse - Chap. 08 MisèrePenot, Achille (1801-1886)
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- F1508